Manon, Manon, quand vas-tu te taire ?

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Ayane Agana-Béléa

Manon Chamack

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C'est l'histoire d'une enfant comme il en existe des milliers : parents divorcés, mère trop occupée, solitude et baby-sitters. Elle est sortie plutôt gagnante de ce mélange, si l'on excepte ce fameux côté égocentrique qui a souvent fait la misère de ses gardiens et de ses enseignants.

C'était une enfant joyeuse, quoiqu'à mi-chemin entre la petite fille gâtée et la gamine frustrée. Sa mère lui cédait de nombreux caprices, avant de subitement se rappeler son rôle de parent et aligner les refus. En ressort chez Manon une incertitude face au côté arbitraire de ces décisions, qui a résulté en encore davantage de cris et de bouderies.

Avec son père, c'était différent. Elle le voyait si peu qu'il en est devenu anecdotique et même aujourd'hui, elle a du mal à le considérer autrement que comme un élément de décor. Il était aussi insensible à ses pleurs qu'à ses grands yeux suppliants mais il était juste et doux avec elle les rares fois où ils se côtoyaient.

Elle s'est fait quelques amis en maternelle et en primaire, jusqu'à ce qu'une fille la prenne en grippe et décide de la faire passer pour une menteuse aux yeux de toute l'école. "On sait tous que ta maman n'est pas vraiment à la télé". Additionnée à des moqueries sur ses grandes dents avancées, cette situation l'a fait rentrer en larmes plus d'une fois. Sa mère, le jour où elle a enfin compris les raisons de la tristesse de Manon, s'est fait un plaisir de débarquer en tant qu'accompagnatrice lors d'une sortie scolaire. Les moqueries changèrent de cible mais, malgré tout le ressentiment que lui évoquait son ancienne harceleuse, Manon ne se joignit jamais au mouvement. Elle ne se priva tout de même pas de la battre aux billes et de lui en rafler le plus possible. Se venger et gagner, que demander de plus.

Pendant une bonne partie de son enfance, Manon a été confiée aux bons soins de Marinette Dupain-Cheng, fille d'un des amis de sa mère. C'était une baby-sitter pétillante de vie, quoiqu'assez maladroite, qu'elle a toujours appréciée. Elle aimait autant jouer avec elle que rire de ses bourdes. Bonus non négligeable, Marinette était très sensible à ses yeux de petit chat, et lui cédait presque aussi facilement que sa mère.

Avec Marinette, elle a aussi rencontré Alya qui, elle, savait parfaitement résister à ses regards suppliants. Elle la voyait souvent chez sa baby-sitter et a fini aussi par devenir amie avec ses petites sœurs, les jumelles qui lui menaient la vie dure. Pendant très longtemps, elle a cru à la première histoire que lui a racontée Alya, selon laquelle elle serait une licorne magique de la planète Rispa capable d'exaucer les vœux. Elle n'y croit plus aujourd'hui, évidemment, mais ça a tout de même contribué à forger l'admiration qu'elle ressent toujours pour la jeune journaliste, et qui s'est renforcée au fil des années.

Contrairement à Alya et Nadia, cependant, Manon n'a jamais eu la fibre reporter. Elle s'est par contre très vite intéressée aux techniques créatrices de Marinette et l'a beaucoup observée pendant ses séances de couture ; elle en a même fait un peu avec elle. Mais elle s'est tournée vers les jouets et la décoration, bien plus dans ses goûts que la mode qui fascinait tant sa baby-sitter.

Le collège n'a pas été une période facile pour elle. Elle a dû apprendre très vite à faire preuve d'indépendance quand sa mère l'a considérée assez grande pour ne plus la faire garder. En guise d'indépendance, Manon s'arrangeait surtout pour passer le plus de temps possible chez les jumelles et ses autres amis, pour ne pas se retrouver seule.

Son dévorant besoin de social lui a joué des tours. Jalousie devant les couples naissants de ses amis, qui passaient moins de temps avec elle, sentiment pesant de solitude quand elle n'avait d'autre choix que de rester à la maison, mauvaises fréquentations avec qui elle a heureusement coupé les ponts avant d'être entraînée dans une spirale descendante. Les hauts et les bas de son débat d'adolescence n'ont pas toujours été tendre avec elle, mais elle a su garder confiance en l'avenir, même lorsque Gabriel Agreste ss'est transformé en monstre. Elle a adopté la mentalité de Marinette à force de la côtoyer et considère que tout peut se réparer ou s'arranger avec de la bonne volonté.
Et de la bonne volonté, pour le lycée et tout ce qui suivra, elle en a à revendre.